Peindre dans une boîte de Petri Teach article

Créez une œuvre d’art vivante avec de l’agar pour découvrir le monde invisible des microbes qui vivent sur nos mains.

Lorsqu’ils entendent le mot « bactéries », de nombreux écoliers s’agitent sur leur chaise, mal à l’aise. Alors que les bactéries sont souvent perçues comme mauvaises et associées aux maladies et infections, la majorité d’entre elles sont inoffensives pour l’être humain, et de nombreuses bactéries sont même bénéfiques.

Tout comme d’autres micro-organismes (comme les virus et les levuresw1), les bactéries sont trop petites pour être visibles à l’œil nu. Elles sont cependant tout autour de nous. L’une des manières de révéler leur présence et de les cultiver dans des boîtes de Petri remplies d’agar (aussi connues sous le nom de plaques de gélose), une activité populaire pour les écoles.

Depuis quelques années, cette idée simple s’est transformée en une forme d’art : tout autour du monde, des bactéries sont utilisées pour créer de magnifiques œuvres d’art (« l’art d’agar » ou « art microbien » w2). Différentes espèces de micro-organismes de diverses couleurs sont précautionneusement inoculés sur une plaque de gélose à l’aide d’une anse de platine. La plaque est incubée pour que les bactéries se multiplient, dans l’espoir qu’il en ressorte un chef-d’œuvre microbien.

Agar art
« Finding Pneumo », une peinture microbienne de corail par la technologue en microbiologie Linh Ngo
Andrew Simor/Linh Ngo/American Society for Microbiology
 

Faire de l’art microbien à l’école (tout en adoptant une approche simplifiée) est une méthode amusante pour familiariser les élèves au monde des micro-organismes. Les travaux pratiques décrits dans cet article sont adaptés aux élèves de 9 à 11 ans et permettent d’en apprendre plus sur des bactéries.

Nous procurons également un travail pratique d’introduction pour en savoir plus sur l’hygiène des mains. Bien qu’il soit essentiel pour vos élèves de comprendre que toutes les bactéries ne sont pas dangereuses, vous devez également souligner qu’il est important de se laver les mains rigoureusement pour éviter la propagation de maladies infectieuses.

Si vous décidez de mener les activités suivantes l’une après l’autre, gardez en tête qu’il faut les espacer d’au moins deux jours pour pouvoir mettre les bactéries à incuber.

Consigne de sécurité

Pour les procédures qui suivent, il est conseillé aux élèves de porter une blouse. Les élèves ne doivent ni boire ni manger dans la salle de classe/ laboratoire ou mettre leurs doigts ou quelconques substances dans leur bouche. Une fois que les boîtes de Petri ont été incubées, les élèves ne doivent pas retirer leurs couvercles.

Tout déchet contaminé (par exemple : anses jetables et plaques de gélose) doit être jeté dans un récipient approprié et récupéré par un service d’élimination de déchets de laboratoire. Si c’est impossible, tout équipement contaminé peut être traité avec du désinfectant (par exemple de l’eau de Javel) et jeté dans une poubelle normale.

Travail pratique 1: empreintes bactériennes des mains

Se laver les mains est le meilleur moyen d’éviter la propagation d’infections. Lors de ce travail pratique simple, les élèves découvrent l’importance d’une bonne hygiène en comparant deux plaques de gélose avec l’empreinte de leurs mains – l’une avant et l’autre après lavage. Ce travail pratique dure environ 1 heure, et les élèves peuvent travailler individuellement.

Matériel

Chaque élève aura besoin du matériel suivant :

  • Deux plaques de géloses toutes prêtesw3 (diamètre standard de 100mm)
  • Stylo indélébile
  • Savon pour les mains (ou savon antibactérien), eau et essuie-tout

Marche à suivre

Pupils press their fingers onto agar
Figure 1: Des élèves pressent
leurs doigts sur la plaque de
gélose pour transférer les
bactéries sur l’agar.

Ana Margarida Madureira
 

Donnez les instructions suivantes à vos élèves, avec démonstration si nécessaire :

  1. En utilisant un stylo indélébile, marquez sur le dessous des boîtes de Petri « avant » et « après », ainsi que votre nom. Lorsque vous retournez une boîte, pensez à bien tenir le couvercle pour éviter qu’il ne tombe.
  2. Placez les plaques de gélose sur la table (le couvercle vers le haut) et retirez le couvercle de la plaque marquée « avant ».
  3. Pressez vos doigts fermement sur l’agar (figure 1) puis retirez-les.
  4. Replacez le couvercle et lavez-vous les mains avec du savon et de l’eau. Séchez les bien en utilisant de l’essuie-tout.
  5. Répétez la procédure pour la plaque marquée « après », en pressant vos doigts fermement sur l’agar.
  6. Replacez le couvercle et lavez-vous les mains après avoir touché l’agar.
  7. Gardez les deux plaques en lieu sûr et laissez incuber à température ambiante (environ 20°C) pendant 48-72 heures, ou jusqu’à ce que vous puissiez voir des colonies bactériennes.

Observations et discussion

Lorsque les plaques sont prêtes, demandez à vos élèves de comparer leurs empreintes « avant » et « après » (figures 2 et 3). Les questions et exercices suivants peuvent les encourager à analyser les résultats :

  • Qu’observez-vous sur vos plaques de gélose ? Que sont ces taches ? Y a-t-il différents types de taches (par exemple différentes couleurs et formes) ?
  • Y a-t-il une différence de croissance bactérienne entre l’empreinte « avant » et « après » ? Qu’est-ce que cela signifie ?
  • Comptez les taches sur chaque plaque pour estimer le nombre de colonies bactériennes. S’il y en a trop pour les compter, estimez le nombre pour toute la plaque en vous basant sur une section. Prenez note des résultats dans un tableau commun pour toute la classe (voir tableau 1).
  • Comparez vos plaques de gélose à celles d’autres élèves de votre classe. Pourquoi certaines plaques ont-elles plus de colonies bactériennes que d’autres ?
  • Qu’est-ce que cela signifie pour l’hygiène de vos mains, et celle de vos camarades ? Que conseilleriez-vous à vos camarades de classes selon ces résultats ?

Par expérience, nous remarquons que les élèves sont souvent surpris par le nombre de colonies sur les plaques – et par la variété des couleurs et des formes de différentes colonies bactériennes. Le travail pratique peut aussi permettre de donner une leçon aux élèves qui se lavent mal les mains et qui ne voient pas de changement (ou même une augmentation en croissance bactérienne) entre leur « avant » et « après ».
 

'Before' and 'after' agar plates for pupil 10
Figure 2: Plaques de gélose “avant” (gauche) et « après » (droite) pour l’élève 10 (voir tableau 1), montrant une diminution de croissance bactérienne après s’être lavé les mains.
Ana Margarida Madureira
 
'Before' and 'after' agar plates for pupil 8
Figure 3: Plaque de gélose « avant » (gauche) et « après » (droite) pour l’élève 8 (voir tableau 1), montrant une légère augmentation de croissance bactérienne après s’être lavé les mains.
Ana Margarida Madureira
 
Tableau 1: Nombre de colonies avant et après lavage des mains pour 23 élèves qui ont réalisé le travail pratique en classe
 Élève Avant Après Pourcentage de changement
1 144 140 -3%
2 424 208 -51%
3 36 18 -50%
4 110 60 -45%
5 138 118 -14%
6 86 98 +14%
7 55 27 -51%
8 449 490 +9%
9 148 96 -35%
10 600 85 -86%
11 125 69 -45%
12 600 289 -52%
13 68 41 -40%
14 600 245 -59%
15 309 261 -16%
16 67 18 -73%
17 132 108 -18%
18 107 120 +12%
19 82 32 -61%
20 348 234 -33%
21 54 6 -89%
22 92 46 -50%
23 125 127 +2%

Travail pratique 2: “peinture” microbienne

Avant de créer de l’art microbien dans le travail pratique final, les élèves doivent cultiver une espèce de bactérie au choix pour l’utiliser comme « peinture » sur leur « toile » d’agar vierge. Inoculer une plaque de gélose pour cultiver des bactéries nécessite environ 15 minutes, puis la plaque doit être incubée.

Matériel

Chaque élève a besoin du matériel suivant :

  • Une plaque de gélose toute prête
  • Une anse d’inoculation jetable
  • La plaque « avant » du travail pratique 1 (ou alors une culture de Staphylococcus epidermidis achetée)

Marche à suivre

Donnez les instructions suivantes à vos élèves, avec démonstration si nécessaire :

  1. Trouvez la bactérie S. epidermidis sur la plaque d’agar marquée « avant ». S. epidermidis fait partie de la flore cutanée humaine normale et ses colonies sont blanches et rondes avec un diamètre de 1-2mm. Vous pouvez aussi utiliser une culture achetée.
  2. Récoltez S. epidermidis sur le bout de l’anse d’inoculation (voir figure 4).
  3. Prenez une nouvelle boîte de Petri et, avec l’anse, étalez les bactéries en stries sur toute la surface de l’agar (voir figure 5 pour le motif de stries). Commencez par dessiner des lignes dans le premier quadrant de l’agar, tenant l’anse comme vous tiendriez un stylo. Ne creusez pas dans l’agar – touchez simplement la surface.
  4. Tournez la plaque de 90° et dessinez des stries sur le deuxième quadrant.
  5. Tournez à nouveau la plaque de 90° puis dessinez un zigzag entre les autres quadrants striés.
  6. Placez le couvercle sur la plaque et incubez à température ambiante pendant 48-72 heures ou jusqu’à ce que la plaque soit suffisamment recouverte par des colonies de S. epidermidis (figure 6).

Si vous le souhaitez, répétez la marche à suivre pour d’autres bactéries (peut-être d’autres couleurs ou formes de colonies) qui sont présentes sur la plaque « avant », ou en utilisant des cultures achetées. Inoculez chaque espèce de bactérie sur une nouvelle plaque de gélose en utilisant une nouvelle anse.
 

Transfer S. epidermis
Figure 4 : Transfert de S. epidermidis de la plaque de gélose à l’anse d’inoculation
Ana Margarida Madureira
 
Streaking pattern
Figure 5 : Motif strié pour l’inoculation de S. epidermidis sur la plaque de gélose.
Ana Margarida Madureira
 
Isolated S. epidermis
Figure 6 : Colonies isolées de S. epidermidis à utiliser comme « peinture » bactérienne.
Ana Margarida Madureira

Travail pratique 3: Un chef-d’œuvre vivant

Une fois que la période d’incubation est terminée, vos élèves peuvent commencer à être créatifs. Nous conseillons de dédier environ 30 minutes à la partie artistique finale du travail pratique.

Matériel

Chaque élève aura besoin du matériel suivant :

  • Une plaque de gélose toute prête
  • Une anse d’inoculation jetable (une pour chaque type de bactérie utilisé)
  • Une plaque de gélose avec S. epidermidis (et/ou d’autres cultures)

Marche à suivre

Donnez les instructions suivantes à vos élèves, avec démonstration si nécessaire :

  1. Transférez S. epidermidis de l’agar au bout de l’anse d’inoculation.
  2. Utilisez l’anse comme un stylo et dessinez sur la surface d’une nouvelle plaque (figure 7). Vous pouvez dessiner diverses formes, écrire votre nom, ou même faire un croquis.
  3. Au besoin, récoltez plus de bactéries sur l’anse, par exemple lorsque vous finissez de tracer une ligne. Si vous utilisez plus d’un type de bactéries pour créer différentes couleurs ou formes de colonies dans votre dessin, utilisez une nouvelle anse d’inoculation pour chaque culture bactérienne.
  4. Lorsque vous avez terminé, placez le couvercle sur la boîte de Petri et incubez à température ambiante pendant 48-72 heures pour laisser l’œuvre d’art prendre forme.

Vos élèves seront émerveillés de voir leurs dessins invisibles prendre vie. Par la même occasion, nous espérons qu’ils auront acquis une meilleure compréhension de la diversité bactérienne qui nous entoure.
 

Painting microbial art
Figure 7. Des élèves font de l’art microbien en utilisant des colonies isolées de S. epidermidis
Ana Margarida Madureira
Examples of student agar art
Exemples d’œuvres d’art d’élèves, juste après la période d’incubation (cliquez sur l’image pour l’agrandir)
Ana Margarida Madureira

Web References

Author(s)

Aida Duarte est professeure associée (HDR) à la faculté de pharmacie de l’Université de Lisbonne, Portugal, où elle enseigne et coordonne le laboratoire de contrôle microbiologique. Prof. Duarte est également cheffe d’équipe au Centro de Investigacão Interdisciplinar Egas Moniz.

Ana Margarida Madureira est professeure associée à la faculté de pharmacie de l’Université de Lisbonne, où elle enseigne la chimie pharmaceutique. Prof. Madureira a présenté ses travaux pratiques d’art microbien pour écoliers à la conférence « 2018 Hands-on Science » à Barcelone en Espagne.

Review

Cet article permet un enseignement interdisciplinaire avec une méthode amusante qui aborde des concepts biologiques et artistiques. Ces travaux pratiques pourraient être utilisés par des enseignants en science et en arts, ou comme collaboration entre un enseignant en science et un enseignant en arts.

Ces travaux sont parfaits pour discuter de l’omniprésence des bactéries dans nos vies quotidiennes et de la façon dont on peut les cultiver. Cet article promeut également le travail en concert de branches scientifiques et non-scientifiques. Je l’utiliserai certainement dans ma salle de classe.

Dr. Christiana Nicolaou, enseignante en science, Archangelos Elementary School, Chypre

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